Loïc Godener, éloigné des terrains, évoque sa blessure, sa rééducation, sa sélection avec les Barbarians, la fin de saison dernière en Pro D2 et son retour dans l'équipe
Comment se passent tes journées ?
« Au début, avant de voir le chirurgien mi-janvier, mon travail était souvent l'après-midi, où j'avais cardio, muscu, kiné pendant une heure. J'ai fait ce programme pendant un mois, un mois et deux semaines. Et depuis le rendez-vous avec le chirurgien, rendez-vous qui s'est très bien passé, j'ai enlevé les béquilles et je recommence à faire un peu de vélo, du cardio où je peux être debout, de la muscu debout, des squats, un peu de corps. Je reprends doucement et on va essayer de continuer à évoluer le plus vite possible. Mais ne pas prendre de risque non plus. On verra comment ça avance. »
Ta reprise dans le groupe est prévue pour quand ?
« Fin mars, début avril. Après, cette date-là, c'est vraiment si tout se passe bien. On verra. De base, on est parti sur une fin de saison, pour ne pas voir trop gros. Si je reprends en avril, ou même fin avril, et que je peux jouer un match ou deux, ce sera du bonus. »
Comment te blesses-tu ?
« En première mi-temps, je gratte un ballon, il n'a pas lâché tout de suite et je me fais mal. Souvent, ce genre de blessure, ça arrive comme ça. J'avais un peu mal, ça me tirait un peu la cuisse. Ça devait être la cinquième minute. J'ai continué à jouer. Je me suis fait tester à la mi-temps, ça allait bien. Et puis, à un moment, j'essaye de reprendre un joueur et mon ischio lâche. »
On t’a vu en larmes après ta sortie. Tu sentais la gravité de ta blessure ?
« J’étais déçu. Parce que c'était un match qui me tenait à cœur. Et, cette blessure, tout de suite, je savais que c'était plus grave que prévu. Je me suis déj déchiré deux fois, donc je savais que c'était au moins une grosse déchirure. Donc, voilà, j'étais surtout déçu. Ça marchait bien à ce moment. Et, quand ça marche bien, on veut que ça continue. Et voilà, comme on sait, les blessures arrivent toujours au mauvais moment. Et il fallait que ça arrive. »
Ta progression a été marquée par ta sélection avec les Baa-Baas. Des bruits courraient sur l’équipe de France…
« J'avais fait les Barbarians, j'étais content. Pour moi, le but était de jouer le plus possible cette saison en Top 14. J'enchaînais les matchs. J'avais la chance d'avoir fait les Baa-Baas. Après, voilà, au jour d'aujourd'hui, penser à l'équipe de France, non. Non, parce que je suis blessé et parce qu’il y a encore beaucoup de travail à faire. Aujourd'hui, mon seul but est de revenir sur le terrain et de reprendre du plaisir. Après, ça vient, ça vient pas, je ne me prends pas la tête. »
La blessure, c’est aussi une période où on est très seul.
« C'est dur, oui. Automatiquement, tu t'exclus et tu es exclu, parce que tu ne fais pas la compétition, tu ne fais pas les entrainements, tu ne vois pas les copains, tu ne vois que les blessés. C'est vrai que ce n'est pas facile. Mais, j’ai pris une prépa physique, elle s'appelle Christine Herrera, qui bosse sur Grenoble. Elle fait du très bon boulot. Puis, ma compagne, Juliette, qui est là. Je lui passe une dédicace parce que tous les jours, à la maison, c'est compliqué. Les deux premières semaines, j'étais tout le temps à la maison, je ne pouvais pas bouger, j'étais allongé. Quand je ne fais pas de sport en temps normal, je suis chiant. Mais là, quand je suis allongé, je vous explique pas... Elle a été courageuse sur ça. Puis, voilà, j'ai le nutritionniste, Laurent Buttaffoghi, qui me fait un repas chaque jour. Il y a les prépas Patick Chassaing, Robin Panisset et Benjamin Simond-Cote, qui font un travail super avec moi. Et, il y a les kinés, il y a Eudes, Rémy, Vincent, Clément et Béa, qui sont là tous les jours. J'ai même été voir l'acuponcture par diapason. Je n'avais jamais fait ça. Et jeudi, je vais à un cours d'abdo-pilates. Il y a aussi des choses positives : je peux profiter de ma famille, je peux faire plus de choses avec ma copine, je peux faire des trucs basiques qu'on n'a pas le temps de faire quand on joue. La blessure, c'est sûr que ça a été dur les deux premières semaines. Mais, après, je l'accepte. Ça arrivera. C'est arrivé et ça arrivera encore. On fait tout pour bosser et revenir plus fort. »
Tu as mis du temps à intégrer l’équipe, à ton arrivée en 2017. Comment tu l’as vécu ?
« Le passage à la Pro D2, je ne le regrette pas, parce que cela m'a permis de progresser, même si, au début, c'était un peu mal parti pour jouer. Mais voilà, j'ai réussi à jouer et le coach m'a laissé plus de temps de jeu. Dewald ne me connaissait pas. Il avait des joueurs de Top 14(Loïc Baradel, Steven Setephano, Fabien Alexandre), plus les recrues, Nuku Swerling qui était d'Oyonnax, et Edgar Tuinukuafe qui avait déjà fait une saison en Pro D2. J'étais le petit nouveau, venu de nulle part. Au fur et à mesure, j'ai réussi à gratter des bouts de matchs et à jouer. »
Tu avais joué quelques matchs avec les Espoirs. Tu gardes un lien avec eux ?
« Ils sont supers. Il y a beaucoup de talent en plus dans cette équipe. Je connais un peu moins ceux de cette année, il y a en a qui sont partis. Je ne les connaissais pas, et tout de suite, ils te mettent dans le bain, ils sont supers. En plus, cette année, ils font une super saison. Franchement, c'est super des bons mecs. Et je pense qu'il y en a beaucoup, dans pas longtemps, on va entendre parler d'eux. C'est plutôt bien. »
Un autre temps fort de ta première saison à Grenoble, ça a été bien sûr la remontée. Comment passer de la déception de la finale à la victoire contre Oyonnax ?
« On est sorti frustré. En plus, chaque fois que ma famille vient, je me prends des branlées. Du coup, j'ai dit que c'était talisman. Mais les leaders ont trouvé les mots, Fabio, Arnaud Héguy, qui était blessé mais qui faisait partie du staff, etc. Et puis, quand vous rentrez dans le Stade des Alpes, qu'il est blindé, que vous voyez des « Rouge & Bleu » partout, il y a 99% de chance que vous gagnez, vous êtes motivés à bloc. Et je pense qu'Oyonnax aussi est arrivé un peu trop confiant. On a réussi à faire un match incroyable. Je crois que, cette année-là, en ProD2, est une de mes meilleures années rugby. Pour l'instant en tout cas. C'est où j'ai pris le plus de plaisir. Mais cette année aussi, même si je me blesse. Même si au Racing, j'ai joué en espoirs, mais de jouer dans le monde professionnel, il n'y a rien de mieux. En tout cas, ici, je prends mon pied chaque jour. »
Auteur : FCG Rugby